Du temps que passons ici-bas,
Mon cœur, qu’avons-nous fait qui
vaille ?
Nos jours se rendent sans combat,
La trame s’en perd maille à maille,
La main nous défaut en tremblant,
Voilà que le poil nous grisonne,
On nous voit marcher à pas lent
Et même notre cœur raisonne.
L’esprit et le corps sont faillis,
Il ne nous ne reste plus qu’une âme,
Si quelques feux en ont sailli,
Ils brillent de petite flamme,
Ils apportent peu de chaleur
Dans cet hiver qui nous réclame,
S’il faut en juger la valeur
C’est celle d’un tronçon de lame,
D’un pichet de terre ébréché,
D’une chapelle sans verrières,
D’un pauvre champ déjà fauché,
D’une chandelle sans lumière.
Si sommes au pire voué
Où vont gens de sac et de corde,
Cil[1]
qui pour nous fut encloué
Nous doint[2]
pourtant miséricorde,
Nous qui, marris, l’en requérons,
Au nom de la Vierge Marie
Qu’avons prié et prierons
Sans faute ne trigauderie[3].
[1] Cil :
Celui.
[2] Doint :
donne.
[3] Trigauderie :
action de trigaud : personnage brouillon, barguigneur, qui n’agit point
franchement (Dictionnaire de Furetière).
Aucun commentaire:
Enregistrer un commentaire